Amazones : les écrits de Bernard de la Forcade
Une série proposée par Denis Soyer

LES EMBOUCHURES

(...)  "Il n'y a que peu de choses à dire sur les embouchures.  L'amazone peut se servir de n'importe quel mors.  Pourtant, attention !  n'oublions pas qu'une amazone doit être avant tout classique.  Elle ne se lancera donc pas dans des embouchures compliquées pas plus que dans des enrênements artificiels exagérés.  Si elle monte en filet, un simple Chantilly ou un Verdun.  Si elle monte en bride, un mors léger, mors Lhotte ou mors à pompe.

Le choix de l'embouchure incite tout de même à dire qu'il est préférable de voir l'amazone utiliser la bride plutôt que le simple filet.  En effet, disons-nous bien que la cavalière dans les fourches est loin d'obtenir avec sa jambe gauche et sa cravache à droite la précision qu'elle obtiendrait à califourchon.

Evidemment, en ce qui concerne la main, elle aura tout avantage à ne pas étendre cette imprécision, et la recherche de la précision l'amènera fatalement à utiliser la bride au lieu du filet.

Mais, qu'elle s'abstienne avant tout d'utiliser des embouchures fantaisistes.

On voit, à l'heure actuelle, en concours hippique, des quantités de cavaliers qui utilisent souvent sans raison des embouchures ou des enrênements extraordinaire.  Sans doutes pensent-ils pallier ainsi l'inefficacité de leurs jambes ou la maladresse de leurs mains.  C'est une erreur grave.  Il s'agit pour eux d'aller plus vite dans le dressage d'un cheval ; ils remplacent, par des moyens artificiels et souvent mal choisis, la longue patience nécessaire à tout dresseur.  Au demeurant, s'il s'agit d'outils de dressage et si l'on se permet, à tort ou à raison, d'utiliser ces instruments en manège, on doit, un jour de concours ou de présentation quelconque, les ranger ce jour-là à la sellerie.  D'ailleurs, le plus souvent, embouchures et enrênement compliqués sont surtout, entre les mains d'une cavalier médiocre, des armes à double tranchant qui, la plupart du temps font plus de mal que de bien.

Un cavalier qui s'exhibe en public avec des embouchures ou des enrênements non classiques est indécent.  Une femme qui en ferait autant en amazone serait parfaitement indigne de revêtir la tenue d'amazone.

Il est bon pourtant de signaler que, si la progression dans l'instruction est la même que pour un cavalier qui monte à califourchon, il y a tout de même un certain nombre de problèmes qui se posent, dus, bien entendu, comme je l'ai dit plus haut, à l'anomalie créée par la position dissymétrique.  La première difficulté est le trot enlevé.  Et pourtant, il est indispensable que l'amazone s'habitue à cette allure.  Si elle veut faire de longues promenades, si elle veut faire de grandes étapes, surtout si elle veut suivre une chasse, elle ne peut se permettre de trotter assise.  Elle obtiendrait une fatigue rapide et devrait renoncer.

Le cavalier, normalement monté, prend appui sur ses genoux et sur ses étriers en s'enlevant, une battue sur deux.  Il acquiert très vite le rythme souhaité.  La femme dans les fourches a le genou plus haut que les fesses.  C'est là une grosse difficulté, il lui faudra faire un effort considérable pour prendre appui, sur le genou ainsi surélevé.  En fait, elle effectuera, plus encore qu'un appui sur les genoux, une traction, exercée d'avant en arrière par le "creux poplité" de la jambe droite.  Elle devra aussi, pour faciliter l'enlèvement, pencher le buste plus en avant qu'un cavalier normal, et comme elle ne peut s'appuyer que sur un étrier, son effort sera là aussi plus grand.  L'effort à accomplir est important, mais on y arrive avec un peu d'entraînement.  Il convient alors de baisser la ou les mains, car le poignet qui tient les rênes ne peut plus reposer au-dessus de la fourche.  La femme trottant bloquerait avec sa poitrine sa main coincée au-dessus de la fourche.

Le trot enlevé suppose donc un certain entraînement et ne s'acquiert pas du premier coup, il est pourtant indispensable que l'amazone s'y entraîne avec ténacité.

La deuxième difficulté, très différente, réside dans la pratique du galop.  Si l'on veut bien réfléchir quelques instants, on s'aperçoit que le cheval monté dans les fourches doit, normalement, partir au galop à droite.  C'est évident, la cavalière, qu'on le veuille ou non, et en dépit de tous les efforts qu'elle pourra faire, a tout de même la plus grande partie de son poids pesant sur la gauche.  Quand elle met le corps en arrière pour partir au galop, elle va, bien entendu, charger la hanche gauche, donc le cheval va lancer en avant son diagonal droit.  Il galopera sur le pied droit.  En conséquence, si l'amazone galope à gauche, elle se trouvera très secouée.  Il conviendra de s'en tenir au galop à droite.  Elle incitera le cheval à partir  du côté sur lequel il part le plus volontiers.  Elle utilisera sa cravache en frappant l'épaule droite.

Autre conséquence, lorsque l'on prévoit une reprise pour amazones, il faut toujours éviter un galop à gauche.  Tous les dessins de reprises doivent, au galop, s'exécuter sur le pied droit.

Enfin, entrouvrons un chapitre qui pourrait être plus étendu et qui ne s'adresse qu'aux cavalières pratiquant l'équitation supérieure.  Il est, on peut l'affirmer, inutile d'essayer, en amazone, les exercices de haute école.  Ce que l'on demande en l'occurrence à un cheval est trop précis et ne peut se demander dans un équilibre relativement précaire.

On a vu, au cours des années qui ont précédé la guerre, quelques amazones présentant des chevaux en haute école.  C'était à la fois ravissant et surprenant.  Mais renseignements pris, on s'est aperçu que le cheval avait subi un dressage très poussé, monté par un cavalier à califourchon, un homme souvent.  Parfois la femme elle-même qui, pratiquant son dressage en cavalière normale, ne revêtait la robe que pour une exhibition.

Paru dans  HippoNews  Janvier 2000

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