Trouver une prairie
par Alain Willemart

Construire un box dans son jardin, la belle affaire ! Mais dénicher une pâture valable à proximité, quel casse-tête ! Tout le monde n’habite pas à la campagne et même quand c’est le cas, la campagne résiste de moins en moins à l’urbanisation galopante. A la limite, il vaut mieux trouver d’abord une pâture, la louer ou l’acheter, puis seulement chercher à se loger dans les environs, c’est plus facile ! Les habitants des zones rurales ne sont pas nécessairement privilégiés dans la mesure où un nouvel arrivant est souvent considéré avec circonspection...

Tout d’abord, oubliez les agences immobilières. Dans la plupart des cas, celles-ci sont bien plus intéressées par les opérations à haute valeur ajoutée : immeubles ou terrains à bâtir, qui se négocient à des prix sans comparaison avec ceux des terres agricoles. De plus, les agences ne seront pas pressées de vendre à bas prix une terre agricole susceptible de devenir un terrain à bâtir... Quant à la location, les terres agricoles se louent à très bas prix, et, les baux étant de 9 ans (pour les fermiers), les agences n’ont guère intérêt à voir un tel bien échapper à leur contrôle pour un si faible rapport sur une si longue durée. Bref, ne vous étonnez pas si une agence ou un promoteur immobilier détenant de tels biens vous "oublient", malgré de fréquentes relances de votre part. En terme d’achat de terres agricoles, les agriculteurs ont toujours priorité sur les particuliers et si un bien loué est mis en vente, le locataire "en titre" a une option d’achat.

Le mieux à faire est donc de s’adresser directement au propriétaire du bien. Comment ? L’ABC consiste à consulter les petites annonces ou à en insérer une vous-même dans un journal agricole comme le "Sillon belge". Bien entendu, il est illusoire de se limiter à cette démarche.

Milieu rural

Si vous êtes nouveau dans un petit village et que vous avez repéré la pâture dont rêve votre cheval, vous pouvez éventuellement demander les références de son propriétaire à un représentant de l’autorité locale : bourgmestre, garde champêtre ou autre. Outre leur excellente connaissance de la localité et de ses habitants, ces personnes présentent l’avantage d’être relativement peu impliquées dans les éventuels conflits ou affinités existant entre les divers propriétaires, tout en étant bien informées à ce sujet. Cela vous évitera de mettre "les pieds dans le plat" en disant que vous venez de la part de votre voisin (peut-être son pire ennemi...). Si quand bien même vous vous adressez directement au propriétaire, soyez clair quant à vos intentions. Par exemple, si vous cherchez à acheter, n’omettez pas de spécifier que c’est uniquement pour y laisser paître des chevaux et non pour y bâtir une tour de 15 étages. Faute de tact, la belle pâture convoitée vous sera refusée !

Milieu d’habitation

Chercher une pâture en zone "semi-urbaine", c’est-à-dire là où les zones d’habitat ou d’extention d’habitat côtoient les zones agricoles, n’est pas non plus chose aisée. D’abord, les prairies y sont rares ; ensuite, parce que tout le monde ne dispose pas d’un "U.L.M." pour les repérer quand elles sont enclavées. Alors que faire ?

La seule mémoire des autorités et leur bon vouloir ne peuvent suffire ici. Mieux vaut consulter directement le plan cadastral de l’administration communale concernée (gratuit, le matin). Comme le dit Claude Lux (Le cheval en pâture, Editions Maloine) : "le cadastre, c’est officiel et c’est discret". Repérez la (ou les) parcelle(s) qui correspond(ent) aux prairies préalablement repérées sur le terrain. Si vous ne pouvez déterminer l’adresse exacte, repérez l’endroit avec précision sur une carte IGN, en vous basant sur des repaires physiques. A la commune, ou mieux : à la direction régionale du cadastre (chef-lieu de province), notez le(s) numéro(s) de parcelle(s) qui figurent sur le plan et demandez un extrait cadastral. Légalement, l’administration communale n’est pas en droit de délivrer un tel extrait. Celui-ci est payant (le cadastre ressortit au Ministère des Finances !), et vous ne pouvez le demander qu’au service des extraits cadastraux de la direction régionale du cadastre qui vous communiquera : l’identité du propriétaire ou ayant droit, le lieu-dit, sa localisation, la nature de la parcelle, la contenance et le revenu cadastral. Malheureusement, la méthode inverse, c’est-à-dire repérer les pâtures sur le plan cadastral et aller les visiter ensuite, n’est pas possible, car la nature exacte des parcelles (pré, champ, jardin, parking, immeuble, parc...) n’y est pas spécifiée. La nature de la parcelle est renseignée par contre sur l’extrait : terre (labour), pâture (ce qui nous intéresse), pré (pour fauchage), terrain (à bâtir). Mais cette information n’est pas toujours tenue à jour, non pas du fait de l’administration, qui opère une remise à jour chaque année, mais du fait des fermiers qui ne préviennent pas toujours lorsqu’ils clôturent un pré ou qu’ils transforment un pâturage en champ de maïs... Par ailleurs, un terrain peut changer plusieurs fois de propriétaire en une seule année. La consultation d’un notaire est alors nécessaire.

Ne vous étonnez pas de ce que plusieurs lopins de terre (par exemple, un bois, une pâture à vaches, un champ de maïs et un autre de pommes de terre) ne forment ensemble qu’une seule parcelle. Il se peut que le propriétaire baille différentes parties de son bien à des preneurs différents.

Pour ceux qui désirent malgré tout explorer le sol à partir des hauteurs mais dont la monture ne se nomme pas Pégase, il existe des atlas de photographies aériennes particulièrement bien détaillés et clairs sur lesquels des prairies enclavées et invisibles depuis la route ou le chemin sautent magnifiquement aux yeux ! Malheureusement, ces "Aéroatlas", édités conjointement par le Crédit Communal et les Editions Lannoo ne sont pas bon marché (2.450 à 2750 BEF) et ils ne couvrent que les Brabant flamand et Wallon, la province d’Anvers et de Flandre orientale. Vous trouverez toutefois ces ouvrages en bibliothèque.

Location-pension

Attention, le bail agricole d’une durée de 9 ans oblige le locataire à entretenir les clôtures et le terrain. Le non-respect de cette clause peut signifier son expulsion. Cela dit, ces baux ne valent que pour les agriculteurs, dont les loyers sont directement calculés sur le revenu cadastral des terres. Entre agriculteurs, il est généralement admis que le loyer annuel correspond à 3 x le revenu cadastral. Selon cette formule, le loyer dépasse rarement 10.000 BEF/an ! Si une terre agricole est louée à un particulier pour y placer ses chevaux de loisirs, le loyer est libre. Dans ce cas, rien ne vous oblige à accepter les conditions du bail agricole (entretien). Vous pouvez également conclure avec le propriétaire un arrangement saisonnier basé sur le nombre de chevaux et le nombre de jours d’occupation. Dans ce cas, l’entretien ne vous incombe pas, mais rien ne garantit que vous disposerez des mêmes lieux l’année suivante.

Dans tous les cas, inspectez bien les clôtures et la propreté des lieux (détritus et machines abandonnées) avant d’y lâcher votre cheval !

Extrait du n°260 de l'HippoNews
 

 

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