Le cheval lusitanien en Belgique

Rencontre avec Anne-Marie et Jacques Heraly, éleveurs de chevaux Lusitaniens
par Isabelle Leroy

Anne-Marie et Jacques Heraly élèvent des lusitaniens depuis quelques années.
Leur petit élevage, situé à Mélin, se compose actuellement de 3 étalons, 2 juments et de leurs produits : un poulain et deux pouliches. Une naissance est attendue cette année.
De dimension familiale, celui-ci est révélateur de la situation de l’élevage du cheval lusitanien dans notre pays qui se développe sous l’impulsion de quelques amateurs.
Anne-Marie Heraly assure de plus, le secrétariat d’élevage de “L’Association belge des éleveurs de chevaux lusitaniens” en abrégé: l’ABEL. Elle occupe donc une place clé dans les structures qui se mettent en place pour assurer un soutien pratique et logistique aux éleveurs, et représente une précieuse source d’informations.

La place d’un cheval baroque à l’aube du XXIème siècle

Comme pour beaucoup d’amateurs d’équitation classique, Anne-Marie et Jacques Heraly ont découvert les chevaux portugais grâce à l’enseignement du très regretté, Nuno Oliveira - l’un des plus fameux écuyers de notre temps qui dispensa régulièrement des stages en Belgique -, puis de son fils Joao. Les qualités de ce cheval sont multiples. Docilité, endurance, rusticité, souplesse, mobilité, sont en effet des aptitudes recherchées depuis des siècles par les éleveurs portugais afin d’obtenir une monture franche, soumise et courageuse, capable d’affronter avec brio le taureau dans l’arène. Depuis le XVIème siècle, l’âge d’or de la péninsule ibérique, ces qualités sont également prisées au-delà des Pyrénées et les chevaux furent abondamment exportés dans toute l’Europe. Agréable sous la selle, équilibré et exceptionnellement doué pour les airs de haute école, le lusitanien a de tout temps été recherché par les amateurs d’art équestre.

Comme son cousin le Pure Race Espagnole (Andalous), il régnait dans toutes les cours d’Europe, constituant une monture idéale pour les têtes couronnées auxquelles il apportait magnificence. De nombreux tableaux anciens témoignent de cette situation, tels ceux de Velasquez ou de Rubens. Omniprésent dans les manèges, il affirma sa supériorité jusqu’au XIXème siècle, époque où on leur préféra des chevaux issus de croisement avec des lignées orientales, plus rapides, aptes à l’obstacle et correspondant mieux aux épreuves sportives modernes.

Aujourd’hui, hors de la péninsule ibérique, le lusitanien est particulièrement prisé pour le spectacle. Il est aussi capable de briller dans les disciplines sportives modernes. C’est ainsi que le cheval Novilheiro, sous la selle de John Whitaker a gagné en 1983 le championnat d’Angleterre de saut d’obstacles et que notre compatriote Félix-Marie Brasseur a remporté en 1996 le titre de champion du monde d’attelage à quatre, avec les chevaux lusitaniens de Monsieur de Mélo. Malgré les belles démonstrations de Catherine Durand, qui fut récompensée en France, avec son lusitanien Orphée comme couple de l’année 1993 en dressage, le lusitanien a du mal à percer sur les carrés de dressage. Cette constatation, qui frappe aussi d’autres races de chevaux de type baroque (e.a. Pure race espagnole et Lippizans), est surtout liée au fait que les critères modernes du dressage et l’hégémonie allemande ont pour conséquence que l’on récompense davantage l’amplitude et la régularité que le rassembler et la mobilité. Or, le lusitanien est un danseur plus qu’un gymnaste. Ses aptitudes, il les a forgées face au taureau et non devant un juge. Aujourd’hui encore, certains estiment sa présence incongrue, voire "exotique", sur le carré.

Tiraillés entre tradition et modernité, les éleveurs essayent de trouver une voie. Il leur importe cependant d’être prudents afin de ne pas tomber dans le piège de la fonctionnalité, ce qui entraînerait insidieusement la perte de qualités particulières et exceptionnelles. Sans doute verra-t-on bientôt naître de nouvelles lignées de lusitaniens plus "germaniques"...

Modèles et allures

Le lusitanien est un cheval très typé au modèle harmonieux. Par sa conformation, il a naturellement des aptitudes pour le rassembler. De corpulence moyenne, son corps, aux formes arrondies, peut s’inscrire dans un carré. Sa tête est expressive au profil légèrement subconvexe. Ses mâchoires sont peu développées, ses joues sont assez longues. Ses oreilles sont fines et son regard vif. L’encolure sort du garrot sans marque de dépression, de longueur moyenne, elle est courbe et garnie d’une abondante crinière. Le poitrail est profond et musclé. Le rein est court et large, la croupe puissante et ronde. Les membres sont secs et musclés. Les allures agiles et élevées sont souvent spectaculaires.

La race admet toutes les robes. La grise et la baie sont les plus répandues mais l’on voit aussi couramment des alezans, palominos, isabelles ou zains. Elevé en vase clos sans apport de sang autre qu’ibérique, le cheval lusitanien est un pur-sang. Les chevaux produits par les haras nationaux sont les Alter Real. De souche espagnole, ces chevaux sont toujours de robe baie. Leurs origines remontent à 1748. Des générations durant, l’Alter Real fut le privilège des princes et des rois. A côté de l’élevage officiel, les éleveurs ont développé deux lignées, la lignée Veiga et la lignée Andrade. Le cheval de sang "Veiga" est un animal fin et vif, à la tête petite et au profil subconvexe. L’"Andrade" est un cheval plus fort, légèrement plus grand et moins nerveux. Sa tête est généralement plus droite. Les éleveurs actuels recherchent pour la plupart l’équilibre entre les deux tendances.

L’élevage, une question de tradition

Au Portugal, par tradition, seuls les chevaux mâles sont montés tandis que les juments sont exclusivement réservées à l’élevage. Tout au long de l’année, elles pâturent en semi-liberté avec leur poulain sur de vastes pâturages, ce qui leur confère résistance et sûreté de pied. Par hygiène mais aussi afin de permettre de mieux juger leur modèle, juments et poulains ont la queue et la crinière rasées. A l’époque du sevrage chaque individu est marqué au fer sur la cuisse droite s’il est de pure race, sur la cuisse gauche s’il est issu d’un croisement. En Belgique cette tradition se perpétue aussi et chaque éleveur a sa propre marque.

Dans notre pays, l’élevage est bien plus familial qu’au Portugal et est principalement concentré dans le Brabant Wallon. Un éleveur possède rarement plus de trois ou quatre juments qui, si possible, servent aussi sous la selle. Actuellement, on recense environ 50 juments, dont 20 en production, pour environ 50 mâles. Cette situation, qui peut sembler étrange, tient au fait que les amateurs ont d’abord fait l’acquisition de chevaux destinés à être montés et qu’il était jusqu’il y a peu très difficile d’importer des juments de qualité. L’élevage eut aussi à subir les affres des épidémies de peste équine qui enrayèrent de nombreuses années les exportations.

Depuis une dizaine d’années, les passionnés et amateurs de lusitaniens se sont regroupés au sein de l’A.B.E.L. : "L’Association Belge des Eleveurs de chevaux Lusitaniens". Cette association qui a pour propos d’élever et de promouvoir le cheval lusitanien est reconnue par les instances portugaises depuis 1990. Servant de lien entre les éleveurs belges et portugais, elle leur apporte un soutien logistique, tient à jour un livre des naissances, se charge d’organiser des expertises, d’obtenir les certificats d’origines, propose des répertoires de chevaux à vendre en Belgique, mais aussi en France et aux Pays-Bas. De plus l’ABEL organise des manifestations de promotion (présentation lors des Jumpings et Salons de Bruxelles, Liège, Malines - démonstration du travail de haute école avec l’Académie Belge d’Equitation) et s’assure la collaboration et le soutien d’écuyers Portugais et spécialistes de renom.

Les critères de sélection appliquées par l’ABEL tentent le plus possible de se rapprocher des critères en vigueur au Portugal. L’association vise à améliorer la race en restant fidèle au standard. Les mâles comme les juments doivent subir une expertise avant d’être reconnus aptes à la reproduction. Cette expertise est unique et sans appel, les mâles sont présentés montés et en main, ils doivent obtenir une cote de 72% pour être admis. Les juments sont présentées en main et doivent obtenir 65%. Un cheval refusé ne pourra plus être représenté, on comprend dès lors que pour l’éleveur il est primordial de ne pas se tromper, que ce soit lors de l’acquisition d’un cheval ou dans le choix des reproducteurs. Jusqu’à présent, la reproduction se faisait exclusivement de manière naturelle. A partir de cette année, l’insémination par spermes réfrigérés est également admise mais soumise à des quotas stricts. En Belgique l’expertise se déroule lors de la désormais traditionnelle "Journée du Cheval lusitanien" qui prend place, en octobre, dans les installations de la Chevalerie à Rhode-Saint-Genèse. Celle-ci est jugée par les instances portugaises qui se déplacent pour l’occasion. Dépendant jusqu’à présent exclusivement du Portugal, l’ABEL est en voie d’être reconnue par le Ministère de l’Agriculture.

Un premier bilan

plutôt positif

Le cheptel du cheval lusitanien est essentiellement concentré dans la péninsule ibérique, en France et au Brésil. En Belgique, l’ABEL recense environ 200 individus (chevaux déclarés). La race s’adapte bien dans notre pays. Les pâturages étant beaucoup plus restreints mais aussi beaucoup plus riches qu’au Portugal, l’éleveur doit se méfier des désagréments causés par un excès d’embonpoint. En effet, le lusitanien est un cheval rustique qui se contente de peu mais qui déborde de fougue. Trop nourri et trop peu sorti, il risque, comme tous ses congénères, d’être victime de coliques, fourbures ou coups de sang. La qualité de nos pâturages a aussi comme effet de donner naissance à des chevaux plus forts et ayant plus de taille.

En pleine expansion (1 naissance enregistrée en 1991, environ 30 en 1997), l’élevage du lusitanien "belge" se porte plutôt bien, et s’adresse surtout à un public de connaisseurs sachant apprécier la qualité à son juste prix. Excellent cheval de manège, on peut espérer qu’il retrouve une place de choix dans toutes les écoles d’équitation dignes de ce nom.

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Pour tous renseignements :
A.B.E.L. asbl
c/o Madame Claudine GILLION - Drève de Lorraine 21 - 1180 BRUXELLES
tel 02/374 57 39 - fax 02/374 50 54 - a.b.e.l.@altavista.net

Extrait du n°260 de la revue HippoNews

Les journées du Cheval Lusitanien
AU ROYAL ETRIER BELGE

Le cheval lusitanien est à l’honneur lors de la réalisation des journées chaque année qui lui sont dédiées au Royal Etrier Belge, champ du vert Chasseur, 19 à Uccle.
L’Office du Commerce et du Tourisme du Portugal, en collaboration avec Portugalia Airlines et la Région de Tourisme d’Evora, y crée un esprit de détente et de fête caractéristique du sud.

Un dîner de gala a lieu le samedi par le “Groupo Cantarès de Evora” et ses chants traditionnels de la région ; le spectacle équestre qui précéde le dîner démontre la souplesse de ces chevaux en même temps qu’une précision indéniable lors des épreuves de dressage de haute école.

Tous le week-end : exposition et dégustation de produits et de la région.  mais aussi : exposition de photos et beaucoup d’informations sur cette région du Portugal qui vaut vraiment le détour, pour l’homme de cheval, mais également pour tous les autres.

d'après un extrait du n°264 de la revue HippoNews
 
 

Savez vous qu'il existe en Belgique une académie d'équitation ? 

Qui sont les académiciens belges ?
En 1987, des cavaliers enthousiastes et passionnés décident de se lancer dans une aventure qui pouvait paraître utopique à l’échelle de la Belgique : la création d’une académie visant à illustrer et à promouvoir un art équestre issu d’une longue tradition européenne. 

Elle faisait siennes les règles établies dès le XVIe siècle dans les Académies de la Renaissance italienne, affinées à l’époque classique dans les Cours Européennes pour connaître leur apogée en France, au XVIIIe siècle avec l’Ecole de Versailles et le Prestigieux écuyer qu’était La Guérinière. 

Elle prenait ainsi comme modèle des institutions aussi illustres que l’Ecole Espagnole de Vienne, le Cadre Noir de Saumur, l’Ecole Royale Portugaise  d’Art Equestre. 

Ces quatre académies européennes prestigieuses, les seules au monde actuellement, ont d’ailleurs accepté d’emblée de parrainer l’Académie Belge d’Equitation, de l’aider et de l’accueillir au sein de l’Association Internationale d’Art Equestre qu’elles ont formée. 

L’Académie Belge poursuit les mêmes objectifs que ses illustres prédécesseurs : promouvoir la recherche systématique de la beauté et de l’épanouissement du cheval dans la plénitude des mouvements naturels, lui donnant du brillant grâce à la justesse et à la discrétion des aides et à la légèreté, exempte de toute contrainte physique ou morale. 

Les chevaux
Le cheval le plus apte à pratiquer cette équitation raffinée basée sur le rassembler poussé à l’extrême et sur l’équilibre le plus pur est le cheval baroque, issu de la péninsule ibérique. 

Depuis toujours, ce cheval - appelé souvent “Le cheval des Rois et le Roi des chevaux” ou “Le piédestal des Empereurs” - a été sélectionné pour ses aptitudes dans le combat singulier, dans la tauromachie et dans la recherche du brillant dans les airs relevés. 

C’est le cheval “artistique” par excellence.
L’académie n’utilise que des chevaux de cette origine - principalement des Lusitaniens - d’une exceptionnelle noblesse et d’une gentillesse à toute épreuve. 
Ils sont tous entiers. 

Le costume est une reconstitution de l’habit des Ecuyers de la Cour de Belgique de la fin du XIXe siècle.  L’Académie belge ne reçoit aucun subside officiel permanent et ne dispose pas de centre permanent 

extrait du n° 270 de la revue HippoNews

 

 
 
 

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